Ces dernières semaines, j’ai joué à deux titres qui m’ont beaucoup plu : Quantum Break, le jeu d’action à la troisième personne de Remedy Studios, sorti sur Xbox One et PC il y a quelques semaines, et Until Dawn, le slasher movie interactif de Supermassive Games, paru sur PlayStation 4 en août de l’année dernière – mais que je n’avais pas encore eu l’occasion de tester. Assez différents dans le fond, et même dans la forme, ces deux jeux m’ont pourtant fait prendre conscience d’un même constat : alors que le cinéma a très longtemps inspiré les développeurs du monde entier, aujourd’hui, la série télévisée devient une source d’inspiration de plus importante pour les créateurs jeux vidéo.
Until Dawn, un film interactif… épisodique
Si vous avez joué à Until Dawn, vous vous demandez sans doute pourquoi je parle de séries télévisées, quand le jeu de Supermassive Games apparait et se revendique clairement comme un jeu d’inspiration cinématographique, et un hommage au cinéma d’horreur. Clairement dans la veine du jeu Heavy Rain qui adoptait un gameplay et des inspirations similaires – davantage du côté du thriller, Seven ayant été une grande source d’inspiration – Until Dawn propose une expérience relativement contemplative, avec pour principales mécaniques de jeu un système de choix d’une part, et des quick time events d’autre part, faisant de l’ensemble un véritable film d’horreur interactif. Le jeu s’amuse avec le genre du slasher, un genre d’horreur particulièrement codifié. La saga Scream, de Wes Craven, s’est particulièrement amusée à souligner ces codes en rappelant dans chaque film les règles inhérentes au genre, pour mieux les tourner en dérision voire les contourner. Until Dawn s’en inspire en reprenant toutes ces règles, pour donner l’illusion d’un terrain connu, et surprendre le joueur par la suite. Tout y est : le cadre isolé d’un chalet dans la montagne, la bande d’adolescents bien stérotypée, l’événement tragique et inavouable un an plus tôt (la disparition de deux de leurs amies), façon Souviens-toi l’été dernier.
« Côté films, nous voulions dès le début du jeu le rendre familier pour les joueurs, qu’ils se disent ‘Je sais ce qu’il va se passer’, et qu’ils reconnaissent d’où ça vient. Donc les inspirations vont puiser vers Scream et ce genre de films, nous avons mis tous les clichés : tout le monde connaît les règles du style ‘le téléphone ne marche pas, il n’y a pas de réseau » etc… On peut considérer qu’Until Dawn est une adaptation de ces slashers mais seulement au début car après, on brise les règles et c’est là que ça devient vraiment effrayant. » (Will Byles, directeur créatif du jeu, dans « Until Dawn : ‘La mise en place des différents scénarios est comme un château de cartes !’ selon Will Byles », par Diane J. pour Melty.fr)
Et c’est en effet ce qui nous surprend au fil du jeu : du slasher movie, on bascule vers des genres d’horreur fort différents. En fin de compte, le jeu rend hommage au cinéma d’horreur dans son ensemble, tous les genres étant évoqués à un moment où à un autre : l’horreur surnaturelle, le torture porn, le film de zombies. Même les trophées à débloquer dans le jeu s’amusent avec ce mélange des genres – la plupart des noms de trophées étant des clins d’oeil à des noms de films d’horreur. Tout en restant cohérent et même assez intelligent dans son scénario – avec beaucoup de retournements de situation – Until Dawn est un véritable patchwork de différentes inspirations cinématographiques, un hommage fort bienvenu aux différents genres d’horreur. Le tout sans manquer d’originalité, puisque c’est précisément la narration interactive qui fait tout le sel du jeu – une mécanique de choix qui se répercutent et peuvent à tout moment, par « effet papillon », précipiter les personnages vers leur survie ou leur mort, l’idée étant de survivre until dawn, jusqu’à l’aube, l’ensemble du casting pouvant survivre ou mourir au fil de la nuit.
Pour autant, il n’y a pas que le cinéma qui s’est invité dans Until Dawn : à mon sens, la série télévisée figure elle aussi dans les inspirations du jeu, de façon plus subtile, certes, mais bien présente. A commencer par le casting du jeu : si la plupart des acteurs du jeu sont des acteurs de cinéma – et notamment Hayden Panettiere, vue précisément dans Scream 4 – un certain nombre d’entre eux se sont fait connaitre du grand public pour leur rôle dans une série. Hayden Panettiere était Claire Bennet, la cheerleader invincible de Heroes, Peter Stormare jouait John Abruzzi dans Prison Break. Le jeu s’ouvre d’ailleurs sur un superbe générique qui tient à mon sens davantage du générique de série télévisée que du générique de film. Des séries telles que The Walking Dead dans le genre horrifique, ou encore House of Cards, Game of Thrones, ont habitué les spectateurs de séries à des génériques très esthétiques, synchronisés avec une bande-son épique et prenante, donnant le ton de la série. La séquence d’introduction dans Until Dawn parait bien en suivre les traces.
Et surtout, bien qu’il soit sorti immédiatement dans sa version intégrale, Until Dawn est découpé en 10 épisodes, d’une durée de 40 à 60 minutes selon la rapidité du joueur – précisément le format de la plupart des séries télévisées actuelles. Chaque chapitre s’ouvre sur un résumé de l’épisode précédent, suit tour à tour chaque groupe de personnages, avant de se terminer sur un cliffhanger. Une structure narrative clairement empruntée à la série télévisée ; que l’on pourrait même rapprocher à la série 24 heures chrono, qui se déroulait en 24 épisodes d’une heure correspondant à 24 heures en temps réel – ici, les 10 épisodes d’une heure correspondent à autant d’heures « jusqu’à l’aube ». Si l’on ne peut nier l’hommage cinématographique, il convient pourtant bien de constater que la série télévisée, ou tout du moins son format a également influencé Until Dawn.
Quantum Break, une oeuvre « cross-media » entre jeu et série télévisée
J’en viens maintenant au plus récent de ces deux jeux, l’original Quantum Break, développé par les créateurs du jeu Alan Wake. Original, Quantum Break l’est surtout par son format transmédia : c’est tout d’abord un jeu, découpé en 5 actes, mais c’est aussi une série télévisée en 4 épisodes d’une vingtaine de minutes, qui viennent s’intercaler entre les différents actes du jeu. Les acteurs de la série ont également prêté leurs traits et leur voix aux personnages du jeu, de sorte que la transition se fait assez naturellement. Ainsi, lorsqu’une séquence de jeu s’achève, la série en prises de vue réelles prend le relais. L’ensemble forme une seule et même histoire, mais racontée via deux médias différents, deux points de vue différents. Le jeu se concentre principalement sur la quête du protagoniste, Jack Joyce, tandis que la série nous présente davantage les antagonistes de l’histoire – la société Monarch, dirigée par Paul Serene. L’originalité, c’est qu’il y a, comme dans Until Dawn, quoique de manière bien moins poussée, un système de choix avec conséquences. En effet, au sein des différents actes du jeu, il est possible de trouver des objets déterminants, qui modifieront ensuite le déroulement des épisodes de la série (de manière assez anecdotique) ; tandis qu’à la fin de chaque séquence de jeu, le joueur doit effectuer un choix beaucoup plus crucial entre deux branches de l’histoire, qui affectent de façon plus significative le reste de l’histoire, à la fois dans la série et dans le jeu. (Ci-dessous, l’un des trailers pour le jeu, en prises de vue réelles)
Là où Until Dawn nous propose de jouer un « film interactif » voire une « série interactive », Quantum Break fait le choix de distinguer les deux facettes, avec le jeu d’une part et la série de l’autre, mais avec malgré tout la possibilité d’interagir sur la série. Ce format transmédia est clairement ce qui fait l’originalité du titre, puisqu’il permet de constituer un véritable univers narratif, où chaque pièce du puzzle raconte un pan de l’histoire d’une façon différente. Si l’on ajoute à cela que le jeu regorge de documents à lire qui apportent également des détails sur le background de l’histoire, on pourrait presque considérer qu’il y a au total trois formats narratifs différents, tous au service d’une seule et même histoire. Certes, l’on pourrait reprocher à Quantum Break son histoire un peu convenue (un scénario sur fond de voyage dans le temps, de paradoxes temporels et de fin du monde annoncée, c’est sans doute du déjà-vu en matière de science-fiction), ses phases de jeu parfois peu inspirées (si les pouvoirs temporels de Jack sont un véritable plaisir à manipuler, le système de combat armé est en revanche trop classique), et certains moments de la série un poil ringards (le budget n’est pas équivalent à celui d’un Game of Thrones, par exemple, et cela se ressent) – mais ce serait faire du mauvais esprit quand Quantum Break a l’audace de proposer un format original et assumé. Il y a à mon sens beaucoup à exploiter dans le transmédia – plus encore que ce que Remedy a initié avec Quantum Break – et le format épisodique d’une série a l’avantage de pouvoir étendre sur le long terme un univers. On pourrait tout-à-fait imaginer une série qui ferait patienter les fans d’un jeu en attendant la sortie de l’opus suivant. L’engouement actuel pour la série en fait un média intéressant à exploiter, et Remedy ouvre la voie à des possibilités intéressantes.
La série comme nouvelle référence du divertissement
S’ils n’étaient que des cas isolés, Until Dawn et Quantum Break ne seraient pas nécessairement significatifs. Mais nous connaissons depuis quelques temps une démocratisation du format épisodique, à l’instar des jeux du studio Telltale, distribués en épisodes et parfois inspirés d’univers de séries télévisées existantes (The Walking Dead, The Wolf Among Us, Game of Thrones…). Citons également Life is Strange, qui reprend la structure des jeux Telltale et va plus loin encore dans son inspiration « série TV » : les épisodes se terminent tantôt par une sorte de clip musical montrant la situation de chacun des personnages dans l’histoire, soit par un cliffhanger appelant le joueur à acheter l’épisode suivant, deux ressorts typiques des fins d’épisodes de séries. Il est intéressant de constater, d’ailleurs, que l’ensemble des jeux cités dans cet article reposent sur un système de choix et conséquences – l’idée étant à chaque fois, par les choix du joueur, d’influencer la suite de l’histoire, façon « film interactif ». Dans chaque cas, l’inspiration est donc clairement assumée, la différence étant que l’on tend à passer du genre « film interactif » à un genre « série interactive ». Un basculement qui va de pair avec la montée en qualité des séries télévisées ces dernières années : les acteurs de cinéma eux-mêmes jouent de plus en plus dans des séries (citons le cas de Glenn Close dans Damages, de Kevin Spacey dans House of Cards), les budgets de séries sont de plus en plus conséquents, les plateformes de VOD, Netflix en tête, gagnent des abonnés de jour en jour, et la série télévisée semble s’imposer comme le média à la mode, et un genre narratif particulièrement apprécié à la fois par les auteurs et par les spectateurs. En toute logique, le jeu vidéo, qui s’est toujours inspiré du cinéma, suit également ce mouvement.
Rédacteur indépendant passionné par le jeu vidéo, je partage sur ce blog mes impressions et mes émotions sur les jeux qui me touchent le plus.
Les séries et les films ont longtemps été une source d’inspiration pour les jeux. L’inverse est totalement possible ! Until Dawn et The Walking Dead en sont de bons exemples. J’en ai aussi qui concernent les dessins animés et mangas comme les jeux mobile Disney auxquels mes enfants jouent sur https://mobile.jeux.orange.fr/ . C’est un bon moyen de redécouvrir l’univers de ses feuilletons favoris tout en ayant la possibilité d’incarner des personnages qu’on apprécie, je pense.
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